Police perso : Cristiani Corsi: Le Chrétien et le migrant
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vendredi 2 octobre 2015

Le Chrétien et le migrant

Nous publions un article de M. Antoine Luciani, agrégé de lettre classiques, ancien professeur de grec à l'université de Corse. Monsieur Luciani est notamment l'auteur d'un opuscule de grande qualité, "La nécessaire sécession", traçant les lignes d'un nationalisme corse authentique, en rupture avec les idéologies héritées de la république française.



       De récents événements ont posé avec acuité le problème de l’accueil et du « vivre ensemble ».
Il ne pouvait en être autrement à notre époque dite « post-moderne ». L’époque « moderne » se caractérisait par la déification de la Raison - avec son cortège : Science, Progrès, Bonheur – qui vit éclore les grandes utopies du 19ème siècle, dont Victor Hugo fut le chantre merveilleux et émerveillé (Temps futurs, vision sublime / Les peuples sont hors de l’abîme…). Elle finit, comme toute les utopies, dans la dictature et les massacres. La Raison qui, étant universelle, et en quelque sorte transcendante à chacun de nous, permettait les grandes entreprises collectives, se replia alors sur l’individu : à chacun sa raison, à chacun sa vérité. Ainsi naquit l’époque « post-moderne » qui est la nôtre. L’Etat, renonçant désormais à ses fonctions régaliennes (assurer le Bien commun et travailler à la gloire de la Nation) se donna pour but de permettre et de garantir l’épanouissement de chacun. Du gouvernement on passa à la gouvernance. L’individu est promu Roi, et ses besoins, ses désirs, ses aspirations deviennent des droits, exigibles. C’est là l’essence du « libéralisme » de l’ « Etat bourgeois » qui domine en Europe comme en Amérique.
Pascal Salin, dans son ouvrage de référence « Libéralisme » le résume ainsi : « On reproche au libéralisme d’être matérialiste, de prôner la poursuite exclusive de la richesse aux dépens de tout autre valeur, alors qu’il n’a d’autre aspiration que de permettre l’épanouissement des êtres humains et la réalisation de leurs objectifs spirituels, affectifs, ou esthétiques autant que matériels. On lui reproche d’être sauvage, alors que, fondé sur le respect intégral des autres, il exprime l’essence même de la civilisation. Ce qui caractérise le libéralisme, c’est la reconnaissance du droit de propriété et la liberté contractuelle ». Voilà qui est parler d’or. Voilà qui est séduisant ; le monde occidental ne dit pas autre chose. Le libéralisme implique évidemment la « pluralité des valeurs », toutes respectables. Et fleurissent la tolérance, l’échange, le dialogue, l’écoute, et le respect d’autrui, etc.…
Mais comment faire « vivre ensemble » des gens que tout sépare, race, culture, religion ou irreligion, vision du monde ?
Les bergers des Alpes ont éprouvé cette difficulté lorsqu’on a introduit des loups dans leurs montagnes. Comment faire coexister les loups et les brebis ? Ou bien on les séparait - et alors ils n’étaient  plus ensemble, - ou bien on demandait aux loups de renoncer à leur nature de loups - et alors on tombait dans l’intolérance. Mais le « vivre ensemble » était impossible.
Le bon sens paysan rejoint ici les analyses des sociologues. Léo Strauss, et bien d’autres, ont fait remarquer que vouloir la pluralité des valeurs c’est nécessairement accepter les valeurs exclusives des autres. La contradiction est insurmontable. Certes, l’idée de « laïcité » peut faire illusion. Autour d’elle se regroupe tout le monde politique, dans l’Europe entière. L’Etat est neutre : sa valeur à lui - les « valeurs républicaines » - c’est d’admettre toute les valeurs. Fort bien. Mais qui évaluera les valeurs ? Pourquoi les « valeurs républicaines » seraient elles supérieures aux valeurs islamiques, chrétiennes, bouddhiques, etc. ? Personne n’en a trouvé la raison. Il faut bien reconnaître que cette « valeur républicaine » est destructrice de toutes les autres, et, finalement, destructrice d’elle-même : quand tout se vaut, rien ne vaut. Le nihilisme est au cœur de la République post-moderne.
C’est dans ce monde « post-moderne », que se pose le problème des migrants. Dans un tel monde, malgré le leurre de la  laïcité, le problème est insoluble, et les affrontements inévitables entre « valeurs plurielles »… et opposées.
Mais qu’en serait-il si nous vivions dans un état chrétien ? Il puiserait son inspiration dans l’Évangile. Prenons la parabole célèbre du Bon Samaritain (Luc,10, 29-37). Un homme (probablement un juif, mais Jésus ne retient que sa qualité d’homme) descendait de Jérusalem à Jéricho. Des brigands le rouent de coups et le laissent à demi mort. Passe un prêtre, qui, le voyant, prend l’autre coté de la route. Un lévite, après lui, fait de même. Est-ce par indifférence ? Non. Ce sont des religieux, personnages importants, qui obéissent aux prescription légales : il faut éviter tout contact avec un homme mort, ou demi-mort, pour ne pas être contaminé (Lv,21,1). Et la loi étouffe en eux l’humanité. Survient un Samaritain – un étranger et, de plus, un hérétique - . Lui n’écoute que son cœur. Il est pris de pitié (cette pitié qui  remue si souvent les entrailles de  Jésus). Il s’arrête, va à cet « homme », dont le malheur fait un  frère ; il panse ses plaie, l’emmène à l’hôtellerie pour que l’hôtelier le soigne, et promet à ce dernier de lui payer le reste à son retour. Deux deniers : c’est la valeur de deux journées de travail. Le Samaritain n’a pas sur lui une grosse somme ; il donne tout ce qu’il peut ; mais sa charité ne l’empêche pas de vaquer à ses affaires : il a aussi une famille à nourrir ; il se réserve donc un peu d’argent pour continuer son voyage. Tout cela est à noter, mais nous noterons surtout la différence entre sa situation et celle qui serait la sienne s’il vivait à notre époque. Pour le Samaritain d’alors le blessé n’a aucun droit (Jésus ignore les droits de l’Homme). Ce qui le pousse, c’est uniquement son cœur. Il soigne le blessé parce qu’il est bon. De nos jours il y serait contraint par la loi. « Non assistance à personne en danger ». Autrement dit, il serait obligé, sous peine de sanction, de faire la charité. Et il pourrait la faire, si l’on peut dire, la haine au cœur. Exactement comme le prêtre et le lévite dont il est question dans la parabole. La vraie charité ne peut être imposée par la loi, elle la déborde. Quand l’Etat nous somme d’accueillir les réfugiés, au nom des « valeurs républicaines », il nous ramène au temps des Pharisiens, au temps de la Loi : charité obligatoire, et ce avec l’argent public ! De plus, il contredit ces valeurs dont il se réclame ; car, selon ces valeurs, il devrait les accueillir tous. Les demandeurs d’asile ont des droits, selon l’état libéral, et exigibles. Misérable restriction que celle d’un Rocard, souvent citée comme modèle de sagesse. « Nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde ». Il faut l’accueillir, dût la France en crever, si l’on est libéral au sens de Salin. Nous dirons même davantage : nous devons accueillir tout le monde. Si vraiment, selon la philosophie de l’âge « post-moderne », chaque individu a le droit de s’épanouir librement, comment l’empêcher de venir en France, s’il ne peut s’épanouir que là ?
Nous noterons enfin que le Samaritain de l’Evangile ne ramène  pas le blessé chez lui, mais le rend aux siens. Pourquoi ? On oublie facilement, aujourd’hui, que nous avons une famille, une patrie, qui sont notre milieu naturel, le terreau nécessaire à la vie humaine. Le bon Samaritain se garde bien d’ « assimiler » le malheureux ; il le renvoie dans ses foyers où il se sentira mieux que partout ailleurs. Cela aussi est de la charité ; mais l’âge « post-moderne » déracine et déshumanise sans état d’âme. Il est, par nature, cosmopolite et apatride.
L’Hospitalité ! On oublie que l’hôte ne doit pas forcer la porte, armé des Droits de l’Homme ; par définition, il ne s’installe pas chez son hôte pour toujours. Sa présence est transitoire. Sinon, ce ne serait pas un hôte. Mais, comme hôte, nous le traitons avec respect et avec honneur, C’est cela l’hospitalité corse, qui a ses racines dans la plus haute antiquité, et que le christianisme a transfigurée. Victor Hugo le savait toujours. Lisez sa poésie intitulée Le Pauvre. Notre temps l’a oublié. Et c’est le drame de notre époque.

Que faire, face aux migrants ?

A leur sujet, les gens sont divisés. Alors on en appelle au « dialogue » cher à l’Etat bourgeois. Nous voyons même des hommes d’Église inviter les différentes parties à discuter, au nom de l’Évangile. Les intentions sont excellentes. Mais le résultat dément les espérances. En effet, dans l’Etat libéral, nécessairement laïque, on doit, ou bien se soumettre aux « valeurs républicaines » et renoncer à son identité, ou bien, si on veut l’affirmer, se révolter contre l’Etat. Dans ces conditions tout dialogue est vain, et voué à l’échec. Il attise les tensions au lieu de les apaiser. D’autre part, comment ne pas voir que d’habiles faussaires, manipulant quelques naïfs, camouflent derrière l’Evangile le grand dessein luciférien d’effacement des frontières,de métissage général, et de déculturation, afin d’asseoir le pouvoir du Prince de ce monde ? Et, pour cela, de détruire avant tout le christianisme ? L’antiracisme et « l’accueil de l’étranger » ne sont que des prétextes. Le problème des migrants n’a pas de solution dans l’Etat libéral, mais il sert le mondialisme athée.
Pourtant une solution existe,et c’est la seule : refaire un état chrétien, rayonnant de la charité du Christ, où chacun de nous pourra librement être le Bon Samaritain.





                                                                                                      A. Luciani.

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